Plus de deux mois après la proclamation des résultats
des élections législatives, à l’issue desquelles le parti présidentiel s’est
taillé la part du lion en remportant 66 des 147 sièges de l’hémicycle, le
Président IBK peine toujours à mettre en place une nouvelle équipe
gouvernementale comme le veut la tradition républicaine à laquelle il est
lui-même si attaché. Même s’il a déjà jeté son dévolu sur l’oiseau rare, en la
personne du banquier Oumar Tatam Ly pour rempiler à la Primature, les autres
membres de l’équipe gouvernementale ont aujourd’hui besoin d’être rassurés.
Car, c’est un véritable calvaire que de se poser, en se levant du lit, les
mêmes questions : Qui va rester ? Qui va partir ? Qui va rentrer ? Ces
questions auront bientôt leurs réponses après le retour, ce week-end, du
Président IBK d’Abuja.
Questions qui troublent désormais le sommeil de nos
ministres. Même ceux d’entre eux qui ont récemment reçu » des assurances fermes
« par rapport à leur maintien dans la nouvelle équipe gouvernementale sont loin
d’être sereins pour qui connaît la pression qui pèse sur les épaules du
président de la République, parfois boulimiques de la proche famille et du
parti présidentiel. Chaque clan voulant pousser ses pions sur l’échiquier
gouvernemental dont l’effectif doit pourtant être limité compte tenu des maigres
ressources du pays. Un pays qui sent toujours l’épine au pied de la crise de
Kidal et dont IBK semble ne pas avoir la solution.
En tout cas, nul besoin d’être dans le secret des
dieux pour savoir que tous les présidents africains ont » leur jour « pour prendre
de grandes décisions. En effet, superstition ou pas, le pouvoir change son
titulaire et le pousse naturellement à se méfier des autres. Comme c’est le cas
de cet ancien président de la République du Mali qui a envoyé le nom de trois
personnes à son marabout afin que celui-ci lui propose à qui confier les rênes
de la Primature » sans qu’il ne soit trahi par le titulaire de ce portefeuille
».
Même si personne n’a vu IBK envoyer une telle liste,
rien ne dit que le nom de Oumar Tatam Ly n’est pas passé par le même filtre. En
tout cas, si la reconduction de l’actuel Premier ministre est désormais chose
acquise, depuis décembre dernier suite aux félicitations dont le Président IBK
l’a gratifié, il n’y aucune assurance pour le reste des membres de l’équipe. Alors
que la tradition républicaine voudrait que le Premier ministre en fonction
démissionne aussitôt après la proclamation des résultats définitifs des
élections législatives ou, à défaut, après l’installation de la nouvelle
assemblée.
Dans ces conditions, le Premier ministre Oumar Tatam
Ly n’était pas obligé d’aller rendre une visite dite de courtoisie aux députés
; cela dans la mesure où lui-même devait, au même moment, se trouver en route
pour aller présenter sa démission au président de la République. Quitte alors à
celui-ci en l’envoyant dans ses nouvelles fonctions pour former une nouvelle
équipe gouvernementale. Rien de tout cela n’a été fait ; et cela au mépris de
la pratique républicaine qu’IBK, lui-même, ne cesse pourtant de magnifier à
chaque occasion.
Le changement comme source d’espoir
C’est tantôt la visite du Roi du Maroc au Mali, tantôt
une mission du Premier ministre à l’étranger, si ce n’est un déplacement du
Président IBK lui-même hors du pays qui sont avancés comme prétexte pour
repousser, chaque jour que Dieu fait, la date de la démission du chef du
gouvernement, qui demeure pourtant un préalable à la mise en place d’une
nouvelle équipe gouvernementale. Une attitude qui friseque l’opinion publique a
les yeux et les oreilles grandement ouverts dans l’attente d’un remaniement qui
devra mettre fin aux diverses spéculations et rumeurs qui ébranlent la cité. La
situation économique difficile et le surplace que l’opinion constate dans la
résolution de la crise de Kidal expliqueraient l’impatience d’une majorité
d’observateurs de voir une nouvelle équipe gouvernementale s’installer. Avec
l’espoir que le changement promis par IBK lors de sa campagne ira plus vite et
que le panier de la ménagère en ressentira les bienfaits.
Un autre sujet de préoccupation est celui relatif à la
composition du nouveau gouvernement quand on sait que l’actuel est formé
majoritairement de membres du parti présidentiel et de personnalités issues du
clan présidentiel. IBK ayant promis que son » pouvoir « ne sera pas un gâteau
encore moins un festin, l’opinion attend avec curiosité de savoir si ce
principe sera observé lors de la composition du futur gouvernement
post-législatives. Autre question qui suscite un fort intérêt également, c’est
le sort qui sera réservé aux représentants de l’ex-junte, à savoir les Généraux
Moussa Sinko Coulibaly, ministre de l’Administration territoriale, et Abdoulaye
Koumaré en charge de l’Equipement et des Transports. Leur éventuel maintien
dans la nouvelle équipe gouvernementale surprendrait beaucoup d’observateurs au
moment où leurs compagnons du 22 mars 2012 croupissent dans l’antichambre de la
justice en attendant leur plus que probable jugement. C’est vrai aussi que
certains pourraient considérer leur départ du gouvernement comme une sorte d’ingratitude
de la part d’IBK dont ils auraient contribué à l’élection auprès notamment des
forces armées et de sécurité.
A part ces deux départs plus ou moins attendus,
plusieurs autres ministres risquent de faire leurs adieux dès la semaine
prochaine quand le nouveau gouvernement sera installé. En tout cas, à part les
jeunes ministres proches de la famille présidentielle et certains barons du RPM
au premier rang desquels l’ancien leader estudiantin en ex-URSS, Dr Bokary
Treta, un bourreau de travail et l’un des plus fidèles parmi les fidèles d’IBK,
rien n’est garanti pour les autres que seule la chance pourra sauver d’un
éventuel départ.
En lieu et place des partants, sont annoncés plusieurs
gros calibres de la scène nationale tels Me Mountaga Tall, Housseyni Amion
Guindo dit Poulo, Choguel Kokalla ayant mouillé le maillot pour IBK lors du
second tour de la présidentielle qui l’a opposé au très fair play Soumaïla
Cissé, devenu depuis le chef de l’opposition. En tout cas, il urge que le
président de la République mette fin au suspense qui n’a que trop duré quand on
sait que le changement de l’équipe gouvernementale est en soi une source
d’espoir et d’espérance pour ces millions de Maliens qui attendent énormément
de la gouvernance d’IBK. Et qu’il ne faudrait pas décevoir. Ni maintenant ni
après.
Mamadou FOFANA
Le 28février 2014
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